La Birmanie en quelques chiffres
Population : 62 millions d’habitants (estimation 2011).
Capitale : Nay Pyi Daw
Capitale économique : Yangon (5,8 millions d’habitants)
Principales villes : Mandalay (2,5 millions d’habitants), Moulmein (500 000 habitants), Sittwe (181 000 habitants)
Superficie et géographie Birmanie : 678 528 km2 soit très légèrement plus que la France.
Taux d’urbanisation : 32.59% (2007)
Densité : 90 hab/km2
Système politique : République fédérale de 7 États et 7 provinces
Régime : dictature militaire depuis 1962 en réalité, mais officiellement République depuis 2011.
Président de la République : Thein Sein
Langues : Le birman est langue officielle (parlée par 75% de la population), mais le pays compte une centaine de langues dont le shan (11 %), l’arakan (6 %), le karen (5 %), le môn (3 %), le kachin (2,5 %), le chin, le karenni, le lahu, le rohingya, etc
Monnaie : Le kyat (MMK). 1€ = 1135 MMK
Décalage horaire : +5h30 en hiver, +4h30 en été
Electricité : L’électricité est en courant alternatif 230V, 50Hz. Le plus fréquemment, prises à deux fiches rondes ou plates.
Salaire mensuel moyen d’un fonctionnaire : 50 US$.
Espérance de vie : 65.2 ans
Taux d’alphabétisation : 92 %.
Indice de développement humain (espérance de vie, taux d’alphabétisation, PIB par habitant) : 149e sur 187(rapport 2011 du P.N.U.D, Programme des Nations Unies pour le Développement).
Fête nationale : 4 janvier (fête de l’indépendance)
Religions en Birmanie : bouddhisme (90%), islam, christianisme
L’histoire de la Birmanie
Première civilisation en Birmanie
La première civilisation connue en Birmanie est celle des Môns, arrivés dans la région 3000 ans avant JC. Mélangeant leur culture et celle de l’Inde (culture de Dvaravati), ils dominent le sud du pays jusque vers le milieu du IXème siècle, qui voit les débuts du bouddhisme en Birmanie.
Le Royaume de Bagan
Les Birmans fondent alors un royaume puissant, centré autour de la ville de Bagan. Le roi Anawrahta (1044-1077) unifie la Birmanie et fonde le royaume de Bagan, en 1057. Celui-ci prend le contrôle de la moitié de l’Asie du Sud-Est, puis s’affaiblit lentement, jusqu’à sa destruction par les Mongols en 1287.
Deuxième et troisième empire Birman
En 1535, le roi Tabinshwehti réunifie la Birmanie et fonde le deuxième Empire birman. Celui-ci repousse les tentatives de conquête portugaise, mais s’effondre finalement en 1752. Le troisième Empire birman est fondé presque immédiatement par le roi Alaungpaya. La dynastie Konbaung(1752-1885) mène une politique expansionniste : la Birmanie lui doit ses frontières actuelles.
Guerres anglo-birmanes
Au XIXème siècle, éclatent successivement trois Guerres anglo-birmanes. En dépit des efforts du roi Mindon (1853-1878) pour moderniser le pays, celui-ci ne résiste pas : le 1er janvier 1886, la Reine Victoria reçoit la Birmanie comme cadeau de nouvel an.
La Birmanie envahie par le Japon
Envahie par l’Empire du Japon au début 1942, la Birmanie est jusqu’en 1945 le théâtre de combats entre Alliés et Japonais.
Indépendance et démocratie parlementaire de la Birmanie
Après la fin de la Seconde Guerre mondiale, la voie est tracée vers l’indépendance, sous la conduite du général Aung San. En dépit de l’assassinat de ce dernier le 19 juillet 1947 ; le premier ministre U Nu instaure une démocratie parlementaire.
Coup d’état militaire du général Ne Win
Des insurrections se déclarent rapidement, mais la situation reste à peu près sous contrôle jusqu’au coup d’Etat militaire du général Ne Win en 1962. Celui-ci dirige le pays d’une main de fer pendant vingt-six ans, introduisant des réformes socialistes brutales.
La Ligue Nationale pour la Démocratie et Aung San Suu Kyi
En 1988, un important mouvement de protestation populaire permet à un groupe de généraux de renverser Ne Win en septembre et d’établir une nouvelle junte militaire. En 1990, ils organisent des élections libres, remportées à plus de 80% par la Ligue Nationale pour la Démocratie d’Aung San Suu Kyi, fille d’Aung San. Les élections sont annulées et Aung San Suu Kyi, assignée à résidence ; elle n’a été libérée que le 13 novembre 2010.
Birmanie ou Myanmar
Le nom de la Birmanie continue à faire débat
Si la situation politique du pays avant la libération d’Aung San Suu Kyi a nourri beaucoup de controverses (fallait-il ou non s’y rendre en tant que touriste?), le nom du pays lui-même continue à faire débat. En 1989, le pays fut renommé par la junte militaire : d’Union de Birmanie, il devint Union du Myanmar. En langue locale, le pays est appelé Myanma depuis au moins huit siècles, et signifie “les premiers habitants du monde”. Le terme “Burma” (Birmanie) fut forgé par les colons Britannique à partir du nom du groupe ethnique majoritaire, les Bamar (ou Birmans). Le NLD (Ligue Nationale pour la Démocratie), dont Aung San Suu Kyi est Secrétaire générale, continue d’appeler le pays du nom de Birmanie. Le gouvernement, lui, semble préférer l’appellation “Myanmar”, qui n’est pas liée à la période coloniale et ne marque pas de préférence pour un groupe ethnique par rapport aux autres. Le nom “Myanmar” (attention, on ne prononce pas le “r”) est aujourd’hui largement adopté aussi bien dans le pays que dans la communauté internationale.
En même temps que le nom du pays, de nombreux noms de villes et de rues ont été modifiés depuis les années 1990, comme Rangoon qui a repris son nom pré-colonial de Yangon.
La géographie de la Birmanie
Frontières et régions de la Birmanie
La Birmanie est le plus vaste État de l’Asie du Sud-Est continentale. Elle partage 2185 km de frontières terrestres avec la Chine, 1800 km avec la Thaïlande, 1 463 km avec l’Inde, 235 km avec le Laos et 193 km avec le Bangladesh.
Le pays comprend une longue plaine centrale, large de 960 km à son maximum, bordée d’espaces montagneux tels que la chaîne de l’Arakan à l’ouest. C’est dans cette plaine que vit la majeure partie de la population.
La région de l’intérieur, connue sous le nom de Haute Birmanie, s’ordonne autour du bassin de Mandalay, où convergent les fleuves Irrawaddy et Chindwin, et où le fleuve Sittang prend sa source. Elle constitue le coeur historique du pays.
La région côtière, regroupant la zone alluvionnaire du delta de l’Irrawaddy et la plaine du Sittang, bordée de nombreuses îles, est connue sous le nom de Basse Birmanie. Dans les régions périphériques, montagneuses, la forêt domine.
Le point culminant de la Birmanie est le Hkakabo Razi (5881 m) et son point le plus bas la mer d’Andaman (0 m).
Divisions administratives
La Birmanie est partagée en sept hunkhu (régions) et sept chiu (Etats).
Les sept régions forment ce que les Birmans appellent la « Birmanie proprement dite », c’est-à-dire le pays des Birmans :
– Région d’Ayeyarwady (delta de l’Irrawaddy, capitale: Pathein)
– Région de Bago (capitale : Pégou)
– Région de Magway (capitale : Magwe)
– Région de Mandalay (capitale : Mandalay)
– Région de Sagaing (capitale : Sagaing)
– Région de Tanintharyi (Tenasserim, capitale : Tavoy)
– Région de Yangon (capitale : Yangon)
Les sept États correspondent chacun à un des autres grands groupes ethniques qui peuplent la Birmanie et sont :
– Chin
– Kachin
– Karen
– Kayah
– Môn
– Rakhine (Etat d’Arakan)
– Shan
Les ressources et les richesses du pays
Des ressources naturelles très importantes
Bien que le PIB de la Birmanie soit encore classée en 2013, après une nette progression, 151e sur 187 pays, elle n’en demeure pas moins un pays disposant de ressources naturelles propres très importantes, qui ont toujours été convoitées par ses voisins chinois, indiens ou thaïlandais. Elles sont principalement agricoles et minières. Le secteur primaire représente encore 60% de la production nationale !
Ressources agricoles tout d’abord
Ses forêts abritent 250 essences d’arbres différents parmi lesquelles des espèces précieuses et du teck, très recherché car imputrescible et particulièrement résistant. La Birmanie est le 1er producteur mondial de teck et le 6e producteur mondial de riz (elle détenait la 1ère place dans la première moitié du XIXe siècle). La vallée de l’Irrawaddy est très fertile et riche en limons, ce qui permet au pays de produire entre autres du blé, de la canne à sucre, du maïs, du caoutchouc, du coton et du tabac.
Ressources minières ensuite
Le sous-sol recèle des gisements de minerais (plomb, zinc, argent, tungstène, charbon, pétrole) et de gaz naturel en nombre, sans compter l’or et les pierres précieuses (rubis, jade, saphir), dont le site d’extraction le plus fameux se situe à Mogok.
Ses sites archéologiques, historiques mais également balnéaires constituent autant de centres d’intérêt pour les touristes et ce secteur porteur favorise l’entrée de devises étrangères dans le pays.
Un nouvel eldorado
Si l’ouverture du pays et la levée des sanctions économiques sont récentes, la politique d’attractivité du régime birman n’en est pas moins ancienne : pour pallier son déficit d’infrastructures industrielles lui permettant d’exploiter ses richesses, la junte fait très tôt appel à des investisseurs étrangers avec lesquels elle partage les bénéfices de la production.
Avec le nouvel essor que connaît le pays, dont la position géostratégique est par ailleurs exceptionnelle, ces ressources sont amenées à être exploitées par de nouveaux investisseurs, européens et américains, de manière beaucoup plus intensive et systématique avec les risques écologiques et éthiques que cela comporte.
De son côté, le gouvernement birman multiplie les incitations à l’égard des investisseurs : exonération fiscale de cinq ans, réduction de taxes à l’export, possibilité d’investir sans partenaire local, etc.
Les forêts birmanes
Un patrimoine naturel considérable
La Birmanie dispose de parcs naturels et de forêts primaires parmi les plus grandes au monde qui s’étendent sur 45% de son territoire et abritent environ 7.000 espèces végétales dont 250 essences d’arbres. En 1856 est mis en place le premier système de gestion des forêts dans le pays.
Le teck, une ressource inestimable mais menacée
La Birmanie détient aujourd’hui plus de 80 % des réserves de teck au monde et celui-ci constitue la seconde ressource financière officielle du pays. C’est un bois précieux et imputrescible, très résistant, qui pousse dans les zones tropicales à 1.000 mètres d’altitude. Il est donc très recherché pour la fabrication des bateaux, de mobiliers d’extérieur ou encore de ponts. La Birmanie produit le teck dahat, considéré comme le meilleur teck au monde. Malgré les mesures prises, l’espèce est très menacée et la Birmanie se trouve devant un défi de taille : restaurer ses forêts dégradées et améliorer les stocks de teck naturels existants tout en abandonnant l’exportation illégale vers la Thaïlande et la Chine.
Protection des forêts
Depuis 2.000 ans, les éléphants constituent un moyen particulièrement écologique d’acheminer les troncs d’arbre vers les voies praticables, routes ou cours d’eau. La Birmanie compte 12.000 éléphants dont 6.000 éléphants sauvages et 6.000 éléphants « travailleurs ».
Des territoires sensibles et convoités : le dilemne se pose entre un retour à la paix intérieure et l’exploitation de territoires naturels vierges
Les ressources naturelles ont joué un rôle important dans l’alimentation des conflits entre le peuple karen et le gouvernement central. La signature d’un récent cessez-le-feu avec la KNU (Karen National Union) devrait néanmoins ouvrir la voie à une exploitation inédite et plus industrielle de territoires demeurés presque vierges, profitant jusqu’alors essentiellement aux populations locales. Dans ce contexte, il semble primordial que des organismes de contrôle veillent à ce que les populations locales puissent continuer de jouir des ressources naturelles dans le cadre d’un développement raisonné, équitable et durable, respectueux des hommes, des écosystèmes et de la biodiversité.
Faune et Flore birmanes : au pays des tigres et des éléphants
Diversité avant tout
La diversité des écosystèmes et la richesse de la biodiversité vont de pair en Birmanie : plaines, montagnes, forêts, littoraux, mangroves, climat tropical ou plus frais au Nord…
- dans les forêts septentrionales et sur les hauts plateaux, on rencontrera singes et écureuils volants, éléphants d’Asie (un millier environ), rhinocéros, cerfs, antilopes, buffles sauvages, sangliers et même tigres, léopards, chats sauvages et tapirs !
Au passage, on signale sur le lac Inlé, dans le monastère Nga Phe Chaung, des chats sauteurs dressés par les moines… une curiosité à ne pas manquer !
- les mangroves et zones lacustres constituent un milieu particulièrement favorable aux oiseaux (près d’un millier d’espèces !) mais aussi aux reptiles, crocodiles, lézards, cobras, pythons, etc.
Des espèces menacées
Certaines espèces sont menacées par la déforestation (les forêts sont détruites au profit du développement de la culture du tapioca ou de la canne à sucre) ou le braconnage, parfois même les guerres ethniques (au Nord, en terre kachin).
- C’est le cas du tigre, utilisé dans la médecine traditionnelle chinoise, dont il ne resterait qu’une cinquantaine de représentants dans tout le pays, concentrés essentiellement dans le Nord du pays, dans la réserve de la vallée d’Hukaung qui demeure le principal foyer du tigre d’Indochine.
- Le rhinocéros dit de Java est également menacé par la réduction de son espace vital mais aussi car sa corne est très recherchée en Chine pour ses effets bénéfiques et aphrodisiaques. Il serait aujourd’hui le mammifère le plus menacé de la planète.
- Enfin, le panda roux, qui ressemble plus à un gros raton laveur, vit dans les contreforts de l’Himalaya, en Birmanie, au Népal, en Chine et en Inde. Il est également menacé par la déforestation et l’utilisation de sa fourrure pour la fabrication de chapeaux en Chine.
Les plages : où se baigner en birmanie
Plages mode d’emploi
La Birmanie compte des centaines de kilomètres de plages ainsi que de nombreuses îles, notamment à l’Ouest et au Sud, dans l’archipel de Myeik (Mergui) où résident les fameux « mokens » ou « gitans de la mer », des communautés nomades qui vivent sur les eaux bleues transparentes de la mer d’Andaman.
Entre plage et massages birmans, le bien-être et la détente seront donc au rendez-vous !
Plages de sable blanc
Les trois principales plages de sable blanc de Birmanie se situent dans le Golfe du Bengale. Elles sont de véritables points de ressourcement, loin des villes ou des sentiers trop touristiques. Ne tardez pas car l’activité touristique s’y développe à grand pas depuis deux ans et le prix des hôtels ne cesse de grimper !
- Ngapali (Arakan) : plage de sable blanc, considérée comme la plus belle de Birmanie. A privilégier pour un repos intégral, la visite des villages de pêcheurs, des marchés voisins… et les promenades en bateau sur l’eau.
Bons hôtels : Sandoway, Aureum, Ngapali Bay
Accès : par avion (aéroport de Sandoway = 1h de Yangon).
- Ngwe Saung (Ayeyawady) : la plage de Ngwe Saung se situe à environ 20 km au Sud de celle Chaung Tha, mais l’eau y est plus belle.
Bons hôtels : Plam Beach, Bay of Bengale, Aureum, Treasure Hotel.
Accès : par bus (6-7h de Yangon), en taxi (6-7h également, mais beaucoup plus onéreux), en bateau ou en avion (aéroport de Pathein : très peu de vols, compter ensuite 1h de route pour rejoindre la plage depuis l’aéroport).
- Chaung Tha (Ayeyawady) : plus touristique que les deux autres plages de Ngapali et Ngwe Saung, considérées comme plus luxueuses aussi. Chaung Tha (litt. fleuve plaisant) accueille aussi plus de touristes birmans, locaux et est perçue comme plus authentique.
Bons hôtels : Shwe In Tha (modeste cependant), Emerald Sea Resort.
Mêmes modes de transport que pour Ngwe Saung. La route côtière qui relie Ngwe Saung à Chaung Tha vaut le détour !
La meilleure saison pour aller à la plage est d’octobre à février, en période sèche et pas trop chaude.
Au fil de l’eau : fleuves et vie lacustre en birmanie
L’Irrawaddy, « fleuve mère »
Une légende kachin raconte que le Grand Esprit du monde, depuis l’Himalaya où il était assis, fit jaillir deux sources d’eau jumelles, l’une mâle et l’autre femelle, qui, en se rencontrant, formèrent l’Irrawaddy. L’Irrawaddy prend sa source près de la ville de Myitkyina et traverse la Birmanie de la frontière chinoise au Nord à l’Océan indien au sud, sur plus de 2.100 km !
Les vallées de l’Irrawaddy, particulièrement fertiles, sont les berceaux de la civilisation et des ethnies birmanes : Nagas, Kachin, Chin, Shan, Birmans, Môn, Karen. Ainsi, d’anciennes capitales et villes historiques jalonnent ses rives ou celles de ses affluents : Bhamo, Mandalay, Sagaing, Pakokku, Bagan, Magwe, Prome (Pyay), Rangoun.
Le fleuve pourvoit aux besoins nourriciers de la population, contribue au développement économique du pays et constitue un axe de transport fondamental pour les échanges Nord-Sud. Il recèle des espèces rares, souvent menacées, comme le dauphin de l’Irrawaddy, proche du béluga.
Croisière de Bagan à Mandalay
Pour rejoindre Mandalay depuis Bagan, vous pourrez opter pour la voie fluviale et une croisière de 240 km pour un voyage à l’ancienne, hors du temps. On y redécouvre une Birmanie traditionnelle, celle des campagnes, des chars à bœufs, des pêcheurs…
Sur le Lac Inlé
Situé en plein cœur de l’Etat Shan, fief de la minorité Intha, le lac Inlé fait vivre près de 70.000 Shans : certains vivent sur ses berges, d’autres sur le lac lui-même, à bord de villages lacustres très pittoresques piqués de maisons en bois et bambou tressé, de marchés flottants et de pagodes sur l’eau. Du fait de l’augmentation de sa population mais aussi du déboisage de ses collines alentours, le lac est menacé d’atrophie par les algues qui ne cessent de proliférer.
Ne manquez pas la spectaculaire fête des lumières Thadingyut, qui célèbre en octobre la fin du carême bouddhique par des courses de pirogues et des lancers de ballons et montgolfières aux formes fascinantes.
Mogok, en route pour la vallée des rubis
Entre légendes et histoire
La légende dit qu’un aigle qui survolait le monde aurait trouvé un rubis qu’il aurait pris pour un quartier de chair vive en raison de sa belle couleur pourpre. Ainsi serait née Mogok, à 200 km au nord-est de Mandalay, ville mythique qui a fasciné nombre de voyageurs.
Dans son roman La vallée des rubis, Jospeh Kessel immortalise Mogok d’où sont extraits près de 90% de la production mondiale de rubis, et notamment le fameux rubis « sang-de-pigeon », l’une des pierres précieuses les plus recherchées sur le marché avec le diamant. La valeur du rubis est fonction de sa taille, de sa forme et de sa pureté. Certains ornent la boule en or incrustée de 2.500 pierres précieuses de la pagode Shwedagon !
Si Mogok continue de faire rêver, il faut garder à l’esprit qu’elle fut aussi pendant des siècles l’objet d’innombrables et sanglantes convoitises des « contrebandiers » de la région et des colons français, anglais, japonais…
L’extraction des pierres
Outre les rubis, on vient chercher à Mogok des saphirs, des topazes, des corindons et des spinelles (très proches du rubis), des lapis lazuli, des péridotes. Il existe deux types de rubis : le rubis naturel, non chauffé, et le rubis traité, chauffé pour être homogénéisé par suppression des inclusions intérieures.
L’extraction, qui demeure très peu mécanisée, est l’apanage des femmes qui en font ensuite commerce. La tradition veut que la pierre soit la propriété de son découvreur et le salaire des travailleurs est en fait déterminé sur un pourcentage du prix de vente.
L’envers du décor, ce sont les conditions de travail, épuisantes, et le fait que de nombreuses pierres seraient illégalement exportées vers la toute proche Thaïlande.
Où acheter des pierres précieuses ?
Pour vous rendre à Mogok, il faudra vous munir d’une autorisation spéciale du gouvernement que vous délivrera une agence touristique locale. La demande se fait au moins 3 semaines à l’avance et vous serez obligatoirement accompagné d’un guide.
On peut aussi acheter des pierres au Bogyoke Aung San Market dit « Scott Market », à deux pas de la pagode Sule, mais soyez vigilants aux faux et veillez à obtenir un certificat d’authenticité. Pour plus de sûreté, on achètera dans les boutiques du Gems Museum, au 66 Kaba Aye Pagoda Road.
Pyay, ancienne capitale Pyu
Le royaume de Sri Ksetra
Dès le Ve siècle, le royaume Pyu de Sri Ksetra, littéralement « Cité de splendeur » en sanskrit, est largement marqué par la culture indienne puis bouddhique.
Ancienne capitale du royaume Pyu, Sri Ksetra devenu Prome, est officiellement fondée au VIIe siècle ap. JC. A moins de 200 km au nord de Rangoun, le royaume compte déjà plus d’une centaine de monastères bouddhistes. L’histoire de Pyay est tumultueuse : anéantie au VIIIe siècle, la majorité de ses habitants fut alors déportée au début du IXe siècle au royaume Nanzhao, dans l’actuelle région du Yunnan.
Le déclin de Sri Ksetra se fait vraiment sentir au IXe siècle, laissant place à la puissance régionale montante du royaume birman de Pagan, avant d’être reconquise par le grand Anawrahta au XIe siècle. Elle fut tour à tour le creuset des cultures Pyu, Mône, Birmane et Shan.
Du XVIe au XIXe siècle, plusieurs dynasties, Taungû et Konbaung, convoitèrent la ville, jusqu’à l’arrivée des Britanniques qui s’en emparèrent en 1825, après une guerre mémorable contre le royaume de Birmanie. En 1862, la ville subit un incendie particulièrement dévastateur et fut entièrement reconstruite.
Un haut lieu de la spiritualité
Il reste naturellement d’importants vestiges de l’époque Pyu qui font de Pyay un lieu de pèlerinage très important pour les Birmans : entre autres, la très ancienne pagode Bawpawgyi à Hmawza à une dizaine de kilomètres de Pyay (antérieure au IXe siècle) et la célèbre Pagode Shwesandaw, littéralement « temple d’or des cheveux », qui renferme des cheveux du Bouddha.
Certains stûpas cylindriques s’inspireraient des stûpas de l’Orissa et d’autres édifices cylindro-coniques indianisant sont très proches des architectures de Bagan.
Les musées de Rangoun
Le Musée national
Inauguré en 1952 au Jubilee Hall et actuellement sur Pyay Road, le Musée national est l’occasion de survoler l’histoire, l’art et la culture birmane. Il recèle de pièces fascinantes :
- des palanquins, trésors et trônes royaux des différentes dynasties, dont le majestueux trône du lion royal qui appartint au dernier roi birman, le roi Thibaw,
- des vestiges de l’époque de Sri Ksetra (tablettes votives, urnes, bijoux),
- une reproduction complète de la cave Padalin avec des dessins vieux de 10.000 ans, des armes en pierre du néolithique,
- et même un primate de 40 millions d’années !
Au sein de ses sections, vous y découvrirez :
- l’origine et le développement de l’alphabet et de l’écriture birmane,
- la vie rurale birmane sous ses différents aspects : sociaux, économiques et culturels,
- l’art birman, des peintures rupestres de l’âge de la pierre à l’art contemporain en passant par les dynasties de Bagan, Innwa, Taungoo et Konbaung ainsi que les arts de la scène : orchestre saing waing et marionnettes…
- les cultures des nombreuses communautés ethniques : port vestimentaire, objets traditionnels, de la vie quotidienne,
- des représentations du Bouddha, de l’époque Pyu à nos jours,
- une exposition sur les pagodes, temples, monastères et halls d’ordination des moines.
A noter : pas de climatisation et certaines pièces sont un peu sombres (certaines collections peuvent paraître un peu vétustes).
Le Musée des gemmes et de la joaillerie (Gems Museum)
A ne manquer sous aucun prétexte ! Le musée dispose d’une très belle collection de pierres de toutes tailles, brutes ou travaillées : rubis, saphir, perle… ainsi que des collections de services de thé taillés dans différentes variétés de jade. Le musée offre un joli point de vue sur la pagode Kaba Aye et sa grotte Maha Pasana. Vous pourrez acheter des pierres précieuses certifiées dans ses 82 boutiques !
Le Musée Bogyoke Aung San
Fondé en 1962, le musée relate la vie et les actes mémorables du général Aung San, père d’Aung San Suu Kyi, à travers effets personnels, habits, livres, photos de famille, etc.
Les différentes ethnies en Birmanie
Les Karen
Une myriade d’ethnies
Nomades originaires du Sud de la Chine, les Karen constituent le 2e groupe ethnique le plus important après les Shan avec 4 millions d’individus répartis dans trois grandes régions : le Sud-Ouest, l’Est et les états Karen et Kayah. 90% des Karen vivent en Birmanie, contre seulement 10% en Thaïlande. Le terme karen désigne en réalité quatre sous-groupes principaux aux langues apparentées, parmi lesquels les Sgaw, les Pwo, les Kayah et les Pa-O (proches des Shan).
Un peu d’histoire
Les Karen seraient arrivés en Birmanie en 700 av J.-C. et ils seraient mentionnés pour la 1e fois sur une stèle datant du XIIe siècle. Pendant des siècles, ils subissent les affrontements qui opposent les Birmans aux Môns, aux Thaïs ou aux Britanniques (villages dévastés, populations déportées, travaux forcés…).
De 1942 à 1945, ils sont victimes des exactions perpétrées par l’occupant japonais, alors qu’ils combattent aux côtés des colons britanniques, contre les Birmans. En 1948, les Karen, rassemblés sous l’Union Nationale Karen (KNU), commencent à revendiquer leur indépendance auprès du gouvernement central par la création d’un état Karen.
Lors des soulèvements étudiants et de moines bouddhistes de 1988 (Democratic Alliance of Burma), de nombreux Birmans rejoignent la résistance karen.
De 2000 à 2007 plusieurs tentatives d’accords de paix échouent en raison des répressions militaires, mais le 12 janvier 2012 est signé un cessez-le-feu. Pour autant, de nombreux Karen sont privés de terre, déportés ou exploités. Une minorité accède à des postes à responsabilités, une majorité en revanche travaille comme paysan (riz, bambou), exploitant forestier (teck), pêcheur ou petit commerçant. A la frontière, les Karen vivent essentiellement des échanges commerciaux avec la Thaïlande.
Culture karen
20% des Karen sont chrétiens, 80% bouddhistes, pratiques auxquelles se superposent des croyances animistes. Possédant une tradition orale forte et originale, les Karen utilisent par exemple le poème codé hta, pour résoudre des problèmes sociaux. Femmes et hommes arborent des turbans colorés, les femmes padaungs des anneaux autour du cou (« femmes-girafes ») et les femmes kayah des anneaux autour de leurs genoux (« femmes-éléphants »).
Les Shan
A l’origine…
Première minorité ethnique en Birmanie (11% de la population), les Shan (peuple libre) possèdent une identité culturelle puissante qui force l’admiration et un passé exemplaire. Venus du Yunnan au XIIIe siècle, comme les Karen, les Shan se sont d’abord installés au Nord du pays, à Ava, près de Mandalay, dans les montagnes et hauts plateaux. Shan viendrait de Siam, l’ancien royaume de Thaïlande. L’Etat Shan est limitrophe de la Chine, du Laos et de la Thaïlande (Triangle d’Or).
Doté très tôt d’une administration structurée, sous l’autorité de princes (saopwa), l’état Shan a joui du statut de protectorat et n’a pas connu les mêmes tensions avec le gouvernement birman central que les autres minorités. D’ailleurs, la Birmanie démocratique a eu comme premier président Sao Shwe Thaike, un prince shan.
Mais à partir du coup d’état de 1962, le droit de sécession est aboli et l’état Shan entre en guerre contre le gouvernement central et plusieurs ethnies : Pao, Wa, Palaungs. Le trafic d’opium a eu pour effet d’envenimer localement les guérillas.
Depuis 2005, les conflits se sont durcis entre l’armée birmane et les Shan engagés dans la lutte d’Aung San Suu Kyi, au sein de la ligue shan pour la démocratie proche de la LND (Ligue Nationale pour la Démocratie).
Une culture puissante et passionnante
Les Shan se démarquent par une culture typique dont on peut avoir un aperçu lors des fêtes du nouvel an shan, mais aussi des majestueuses processions de chars votifs, défilés et lancers de montgolfières multicolores lors de la fête des lumières célébrée fin octobre à Taunggyi, capitale de l’Etat Shan.
La musique shan, très différente de la musique birmane, utilise les tambours ozi pouvant mesurer jusqu’à deux mètres de long ! Bien qu’en majorité bouddhistes, les Shan font vivre à travers les danses animalières une mythologie très colorée : danse du couple de paons Kinnari/Kinnara, danse de la chèvre mythologique Toh… Les danses martiales des sabres et flambeaux sont spectaculaires !
Les hommes arborent un costume typique : turban, pantalon portefeuille se nouant à la taille et chemise à col rond.
Les Rohingya
Un peuple persécuté
Originaires de l’Arakan, état musulman au Sud-Ouest de la Birmanie, migrants musulmans venus du Bangladesh pendant la période coloniale ou fils de commerçants et soldats arabes, mongols, turcs, bengalis et même portugais, l’identité des Rohingya est toujours controversée. Ils parlent une langue indo-aryenne, proche du bengali.
Au XIXe siècle, pendant l’ère coloniale, ils sont d’abord employés comme ouvriers agricoles. Plus tard, l’envahisseur japonais et les Birmans auraient tué plus de 100.000 Rohingya et en auraient déporté 22.000 vers l’Inde.
Victimes d’une politique systématique de purification ethnique, de nombreux Rohingya fuient vers le Bangladesh dans les années 70 puis 90, où ils sont rassemblés dans des camps de réfugiés. Destitués de leur nationalité en 1982, sans citoyenneté, exclus du système éducatif, interdits de circulation, victimes d’un véritable apartheid, les Rohingya sont apatrides et n’ont aucun droit.
Aujourd’hui 800.000, les Rohingya sont considérés par les instances internationales comme l’une des minorités les plus persécutées au monde, comme les « Roms de l’Extrême-Orient ».
Les affrontements de 2012
Depuis 2012, des affrontements plus significatifs sévissent entre Rohingya musulmans et Arakanais bouddhistes, causant la mort de plusieurs centaines de personnes et le déplacement de près d’une centaine de milliers de Rohingya, qui tentent de fuir vers le Bangladesh.
Aucun espoir visiblement n’est à attendre du côté du gouvernement birman, d’Aung San Suu Kyi, ni même de la population. Plus grave, il semblerait qu’une faction de la communauté monastique bouddhiste (mouvement 969 mené par le moine Wirathu), extrémiste et islamophobe, ait eu un effet d’entraînement sur les populations lors de ces événements.
En juillet 2013, les Rohingya tentent d’intercéder auprès de François Hollande pour que celui-ci fasse pression sur Thein Sein, alors en visite en France, sur des dossiers essentiellement économiques. En vain.
Sophie Ansel, journaliste spécialiste des Rohingya explique : « La haine qui explose aujourd’hui et qui s’abat contre les musulmans est à la hauteur de la frustration et de la douleur accumulées par des décennies de dictature. Les Birmans musulmans sont les boucs émissaires cibles sur qui se déverse cette frustration. »
Les Moken, “gitans de la mer”
Qui sont les gitans de la mer ?
Peuple austronésien venu du sud de la Chine il y a environ 4.000 ans, les Moken vivent dans l’archipel des 800 îles Mergui dans la Mer d’Andaman (Birmanie) et dans les îles Surin (Thaïlande).
Du fait de leur mode de vie atypique, les Moken ont été victimes de persécutions et de privations tant en Birmanie qu’en Thaïlande : saisie de territoires pour le développement d’activités touristiques ou halieutiques, racket, exploitation. Ils ont également subi les conséquences du développement de l’après-tsunami et de l’exploitation pétrolière des côtes méridionales.
Le risque de la sédentarisation
Les « Moken de Thaïlande » tendent à se sédentariser malgré eux, confinés dans des « parcs nationaux » où on leur impose aussi des restrictions sur la pêche. Les « Moken de Birmanie » prennent eux aussi le chemin de la sédentarisation, mais plus lentement, et vivent de plus en plus du tourisme, dans des villages de huttes au bord de la mer…
Cette sédentarisation tend à dégrader la santé mentale et physique des Moken, désormais en contact avec l’alcool, l’argent et les biens de consommation.
Mode de vie et sagesse traditionnelle
Les Moken sont apolitiques, non-violents et vivent en osmose avec la nature. Essentiellement animistes, ils demandent pardon aux esprits avant de couper un arbre ou de tuer un poisson par exemple. Ils chassent au harpon. Ceux qui n’ont pas renoncé au mode de vie traditionnel vivent 8 à 9 mois par an sur des kabang, bateaux en bois, se déplaçant d’île en île pour des motifs alimentaires, sécuritaires ou sanitaires.
La sagesse traditionnelle se transmet de père en fils, ainsi que les savoir-faire ancestraux (techniques de construction des bateaux), la connaissance de la mer, des vents et des cycles lunaires. Les enfants moken sauraient nager avant de savoir marcher. Sachant décrypter les signaux précurseurs des catastrophes naturelles, certains Moken ont pu réchapper au tsunami de 2004.
La culture en Birmanie
L’art des manuscrits laqués
Les Birmans éprouvent une grande fierté à l’égard de leur culture. Beaucoup vous parleront avec ferveur de leurs anciens rois, des fêtes et des lieux sacrés. Le respect des anciens, la quête de l’harmonie, l’art de la nuance et du compromis sont au cœur de leur mode de vie.
Les manuscrits laqués et enluminés réalisés par les moines entre le XVIIème et le XIXème siècle sont un des plus beaux témoignages de la culture birmane. L’art de la laque reste bien vivace, et vous pourrez admirer de nombreux objets artisanaux réalisés selon cette technique ancestrale, qui nécessite infiniment de patience et de délicatesse. Les plus étonnants sont des boîtes souples fabriquées à partir de crin de cheval laqué.
Théâtre de marionnettes et danses birmanes
Le théâtre de marionnettes (youq-the pwe) est une des formes les plus expressives et uniques de l’art birman. Les marionnettes, qui peuvent atteindre plus d’un mètre de haut, sont manipulées à l’aide d’une douzaine de fils. D’autres, représentant des nat importants, peuvent nécessiter jusqu’à 60 fils, qui vont animer jusqu’aux sourcils. On peut assister à des représentations de théâtre de marionnettes à Yangon, Mandalay ou Bagan.
La musique et la danse traditionnelles birmanes sont associées au culte des nat. Elles occupent une place centrale dans les nat pwe, les fêtes des nat, où la musique, répétitive et jouée très fort, retentit tandis qu’un ou plusieurs nat prennent possession du corps et de l’esprit d’un médium. Les danses birmanes les plus typiques sont des solos de femmes vêtues de robes très colorées à longue traîne blanche qu’elles projettent en l’air à l’aide de leurs talons.
La culture est aussi très liée à la religion Bouddhiste en Birmanie.
Une mythologie haute en couleurs en birmanie
En quelques mots
Traversés de multiples influences, l’imaginaire, la spiritualité et le quotidien des Birmans émanent des héritages croisés animiste (esprits nats), hindou (Ramayana) et bouddhiste (Jataka).
Des créatures fantastiques et animaux anthropomorphiques peuplent ainsi les légendes des 37 esprits Nats, qui règnent sur les montagnes, les forêts et veillent sur tous les aspects de la vie des hommes, et les récits Jataka -les 447 vies du Bouddha avant l’éveil.
Ce joyeux syncrétisme constitue le terreau de l’univers symbolique, culturel et religieux birman.
Dans la cosmogonie birmane, le monde, créé et détruit trois fois, par le feu, le vent (tempête) et l’eau (déluge), est régi par Indra (Thagyamin en Birman), divinité hindoue, roi des esprits Nats et des êtres célestes.
L’influence hindou et le Yama Zatdaw (Ramayana birman)
Très tôt, sous la dynastie Môn, la culture hindoue a pénétré le territoire birman. Dans le Yama Zatdaw, l’ogre Belu est capable de se transformer à volonté. Il a aussi des avatars féminins tels que Popa Medaw, une ogresse mangeuse de fleurs, vivant sur le Mont Popa.
Hanuman, roi des singes et allié du prince Yama (Rama) en quête de sa femme Thida (Sita), est très populaire en Birmanie, et dans toute l’Asie du Sud-Est.
Au cœur de la forêt Himawuntha vivent des oiseaux aux pouvoirs surnaturels : l’aigle Galon (Garuda), ennemi juré du serpent Naga (selon un Jataka, le Bouddha fut prince Naga dans une vie antérieure) ; le couple d’oiseaux kinnara (mâle) et kinnari (femelle), très populaire chez les Shan et les Kayah ; le Karaweik aux mélodies éternelles… Quant au Pyinsa Rupa, typiquement birman, il est l’amalgame de 5 animaux (éléphant, lion, carpe, dragon et cheval).
Zawgyi l’alchimiste
Affublé d’un bâton magique et tout de rouge vêtu, ce magicien vit en ermite dans la forêt du Mont Popa, où il réalise les miracles les plus improbables : il ressuscite les créatures, sauve les hommes en péril, change le plomb en or, transforme des poires en jolies nymphes pour son plaisir ou encore concocte des potions magiques.
La Birmanie des grands voyageurs, une fascination : Pierre Loti et autres
Ecrivains occidentaux
“En Birmanie, rien n’est pareil à ce qui se passe ailleurs.” Kipling.
Nombreux sont les voyageurs qui ont voué une admiration sans bornes pour la Birmanie, le raffinement de sa culture, la richesse et la beauté de son patrimoine, la prégnance de sa spiritualité, de Marco Polo à André Malraux, en passant par Rudyard Kipling, George Orwell, Norman Lewis, Joseph Kessel ou encore Pierre Loti…
C’est probablement Pierre Loti qui, dans son récit Les Pagodes d’Or, a décrit avec le plus de subtilité, à la façon d’un Baudelaire, ce mélange saisissant et troublant d’atmosphères à la fois sensuelles et éthérées, suaves et spirituelles, au cœur de la Pagode Shwedagon.
Tintement enivrant des clochettes accrochées aux stupas se mêlant aux mantras des nonnes, forêts de flèches d’or, foisonnement des statues du Bouddha et des êtres mythologiques, vapeurs d’encens mystérieuses, calme voluptueux, visions merveilleuses de Rangoun, des processions de moines… La Birmanie offre aujourd’hui, un siècle plus tard, à peu de chose près, les mêmes visions, les mêmes enchantements.
Ce qui séduisit l’écrivain explorateur d’autrefois et peut-être plus encore le voyageur d’aujourd’hui, c’est cette impression d’échapper au temps, de vivre dans un passé sans âge où l’histoire des anciens rois comme celle des trente-sept nat est lisible, à ciel ouvert.
Le récit de Michael Symes, Voyage en Birmanie, publié en 1800, constitue l’un des récits les plus vivants et les mieux documentés à l’époque sur le pays et le royaume d’Ava.
Plus proche de nous, Christophe Ono-dit-Biot relate dans Birmane (Prix Interallié 2007) un parcours initiatique à travers un pays criblé de contrastes où coexistent les paysages les plus somptueux, une culture raffinée et un régime dictatorial des plus sombres.
Certains écrivains birmans ont aussi célébré leur pays, tels que Ma Thanegi dans son roman Birmanie – Voyage intérieur.
Livres conseillés
« Itinéraires d’Alexandra David Neel », J. Desires Marchand, Arthaud, 1996
« Vallée des rubis », J. Kessel, Gallimard, 1994
« Terre d’or », N. Lewis, Olizane, 1993
« La nuit du dragon », P. Loti, Kailash, 1992
« Les pagodes d’or », P. Loti, Kailash, 1997
« Une histoire birmane », G. Orwell. Ivrea, 1996
« Sur la route de Mandalay », Thin Mya Tha, Olizane, 1999
« Pont de la rivière Kwai », P. Boulle. Julliard. 1994
« The native tourist in search of the Turtle egg », Ma Thanegi, Swiftwind books, 2000
« Un gentlemen en Asie », Sommerset Maughan, 2000
« The glass Palace » Amitav Ghosh, 2002
Dynasties birmanes
Dynastie Môn (VIe-IXe siècle)
Les Môn fondent leur premier royaume qui s’étend du delta de l’Irrawaddy au Cambodge autour du port de Thaton. Les Môns sont en contact dès le IIe siècle av. J.-C. avec le bouddhisme, grâce aux moines envoyés par l’empereur indien Ashoka. A travers le royaume de Pagan, ils contribuèrent à répandre leur culture chez les Birmans. Ils fondent ensuite un nouveau royaume à Pégou (Bago) de 1287 à 1539.
Dynastie Pyu (VIIe-IXe siècle)
Les Pyus, peuple bouddhiste pacifique, fondent plusieurs villes-royaumes dont Sri Ksetra qui fut la plus grande cité construite en Birmanie. Suite au rayonnement de Sri Ksetra, les Pyu fondent une seconde cité-royaume, à Halingyi, qui fut détruite par le royaume de Nanzhao au milieu du IXe siècle.
Royaume de Bagan (IXe-XIIIe siècle)
Au IXe siècle, les Birmans, qui arrivent par le Nord fondent le royaume de Bagan (Pagan) dont l’âge d’or se situe sous le règne d’Anawrahta (1044-1077). Il conquit Thaton, cité Môn, en 1057. Les rois suivants, Kyanzittha et Alaungsithu, consolident le royaume avant que celui-ci ne tombe aux mains des Mongols au XIIIe siècle. La Birmanie est alors divisée.
Royaume d’Ava et Pégou (XIVe-XVIe siècle)
C’est à Pégou que les Môns fondent leur second royaume en 1369, qui rivalise avec le royaume d’Ava au Nord. La culture birmane connaît alors un âge d’or, notamment littéraire, sans précédent.
Les deux villes rivales s’affrontent durant une guerre qui durera 40 ans. Face à l’essor économique et spirituel du royaume de Pégou, la Cité d’Ava décline lentement.
Dynastie Toungoun (XVIe siècle-XVIIIe siècle)
Au XVIe siècle, des survivants d’Ava fondent le nouveau royaume de Taungû. Le roi Tabinshwehti déplace ensuite la capitale à Pégou. Des guerres avec la Thaïlande (Ayutthaya) et l’Inde (Manipur) éclatent et fragilisent le pays. Face aux invasions portugaises, finalement repoussées en 1613, la capitale du royaume est déplacée de Taungû à Ava, avant de revenir en 1752 à Pégou.
Dynastie Konbaung (XVIIIe siècle-XXe siècle)
Le roi Alaungpaya et ses fils mènent la Birmanie à son apogée. Ils s’emparent de Pégou, Rangoun, Ayutthaya, du Manipur, du Tenasserim et de l’Assam mais les Chinois font des incursions au Nord et le pays est ensuite annexé à l’empire britannique. Mindon et Thibaw furent les deux derniers rois birmans.
Artisanat : Tissage de la soie, laques, tapisseries
Du fait de la fermeture du pays pendant plusieurs décennies, l’artisanat traditionnel birman s’est particulièrement bien conservé, sans s’être pour autant folklorisé : il reflète la richesse des cultures traditionnelles locales.
Mosaïque
Cet art, qui consiste dans l’ornementation de murs avec des pierres précieuses, a pris vraiment son essor pendant la période de Bagan. On utilisait des gemmes particuliers, les « 9 pierres nobles », taillées dans des formes variées (rondes, ovales, carrées, triangulaires) pour décorer des objets du quotidien en vue de les adapter à un goût et à un usage royal.
Tapisserie
Cet art serait né il y a 1.200 ans en Birmanie, pendant la période Pyu, pour décorer les parures royales et celles des hauts fonctionnaires. On brode avec des fils d’or et d’argent et l’on peut aussi intégrer à la tapisserie ou à l’habit des fils de couleurs, des pierres précieuses, du verre coloré, des perles et des graines. Il demeure la spécialité de la ville de Mandalay, réputée pour son artisanat.
Laques
Art birman majeur et spécialité de Bagan, la fabrication des laques est un processus long qui requiert l’application de plusieurs couches de sève sur des vases, des bols ou des boîtes. Celle-ci vire au noir lorsqu’elle sèche. Les objets sont ensuite polis, vernis et décorés de motifs variés – parfois à la feuille d’or, relatant les Jatakas, les vies du Bouddha.
Le tissage de la soie
La soie se porte pour des occasions spéciales, mariages, fêtes. Certains tissus comportent jusqu’à 100 fils de soie différents. Pour les pièces les plus travaillées, on peut utiliser jusqu’à 300 bobines de fils différentes ! Les motifs et couleurs des tissus de soie ont évolué avec le temps. En fonction de la souplesse et de la douceur que l’on souhaite obtenir, on trempe le fil dans des bains bouillants savonneux, auxquels on rajoute la teinture souhaitée. Les fils sont ensuite séchés au soleil. Mandalay et Amarapura sont les principales villes productrices de soie.
Le travail de la feuille d’or, des pierres précieuses, la fabrication des fameux cigares cheroot et celle des marionnettes font l’objet de rubriques à part.
Pierres précieuses et orfèvrerie
La Birmanie aux mille éclats
Les rois birmans avaient pour habitude dans leurs décrets de se prénommer eux-mêmes en utilisant des noms de métaux et pierres précieuses.
C’est Pégou qui donna à la Birmanie ses lettres de noblesse, en témoignent les écrits du marchand gênois Hieronimo de Santo Stefano qui s’y rendit en 1492. La légende courait alors que le roi de Pégou portait autant de bijoux que la valeur d’une très grande ville !
Mogok est aujourd’hui la ville mythique du rubis, mais on vient y chercher aussi des saphirs, des topazes, des corindons et des spinelles (très proches du rubis), des lapis lazuli, des péridotes.
Aussi, si la Birmanie est le pays des pierres précieuses et notamment du « rubis sang-de-pigeon », on ne s’étonnera pas que la couronne hti (ombrelle) qui orne le sommet du stûpa de la pagode Shwedagon, comporte une boule d’or incrustée de 5.448 diamants, de 2.317 pierres précieuses et d’une émeraude de 76 carats !
Des techniques et du raffinement
La technique de la taille des pierres a légèrement évolué au cours des siècles. La valeur des pierres précieuses dépend aussi de la finesse et de la précision de son ciselage. Ainsi, il n’est pas rare que les bijoutiers gardent secrètes leurs techniques pour préserver leur réputation. Ils avaient pour coutume aussi d’utiliser de la poudre de saphir ou de diamant pour polir les pierres précieuses !
Le style birman affiche des ornements très alambiqués, complexes.
Le jade impérial, de couleur vert émeraude coloré de chrome, était vénéré en Chine comme une pierre sacrée et l’on fabrique en Birmanie des Bouddhas tout en jade.
A Rangoun, on peut aussi acheter des pierres au Bogyoke Aung San Market dit « Scott Market », à deux pas de la pagode Sule, mais soyez vigilants aux faux et veillez à obtenir un certificat d’authenticité. Pour plus de sûreté, on achètera dans les boutiques du Gems Museum.
Vêtements traditionnels et textiles
Code vestimentaire birman
Le vêtement traditionnel, le longyi, est toujours porté par les hommes et les femmes de toutes les générations, même s’il est supplanté chez les jeunes ou dans les grandes villes par la mode occidentale. Les hommes le portent avec une veste sans col et une chemise.
Le turban gaung baung se fait plus rare mais on continue de le porter chez les personnes âgées ou pour les grandes occasions. Les femmes portent souvent un chemisier sobre ainsi qu’un châle.
Les Birmans conservent l’habitude de faire leurs habits sur mesure, utilisant toute la gamme des tissus, coton, soie, satin… Le motif favori des Birmans est le lun yakyaw acheik, en forme de vagues entremêlées, qui utilise des centaines de fils de soie différents. Au temps des dynasties, seuls les rois étaient autorisés à porter ce textile.
Plus raffiné et plus rare que la soie, le « Kyar Chi », fait des fibres de la tige du lotus, est toujours fabriqué sur le Lac Inlé.
Couleurs ethniques
Les 135 communautés qui composent le puzzle ethnique birman possèdent chacune un style vestimentaire distinct. En voici quelques-uns :
Les femmes Palaung, qui vivent près de Kalaw dans le Sud de l’état Shan, portent une jupe rouge de forme tubulaire (glahng), striée de rayures multicolores et un turban à carreaux en coton. La veste salow est courte et d’un bleu profond électrique. Ceintures et écharpes sont confectionnées dans du rotin ou du bambou.
A l’époque, les femmes Chin étaient toutes tatouées au visage et portaient d’énormes boucles d’oreille. Leur apparence guerrière vient de leur tunique cousue de fils argentés, de leurs bracelets en laiton et des plumages tropicaux qu’elles fixent parfois à leur coiffure.
Vivant au coeur des états Shan, Kayin et Kayah, les femmes Pa’O sont affublées de costumes noirs ou indigo. Autrefois, elles portaient des chemisiers sans manches. Ce qui attire l’attention, ce sont leur coiffe très colorée, en contraste (orange, rose, bleu).
Les femmes Kachin portent des jupes en laine rouge carmin, assorties à leurs coiffes qui s’apparentent à des tiares, et des vestes en velours sombre.
Arts traditionnels birmans
A ne pas manquer
Les arts traditionnels de la scène birmane tirent leur force de l’incroyable richesse des légendes qu’ils racontent comme de la profonde originalité des rythmes, mélodies, gestes de danse et répertoires.
N’hésitez pas à allez voir les spectacles de danses « humaines », et le théâtre de marionnettes, très proches dans leur esthétique !
Les marionnettes ou l’illusion de la vie (Yok Thei)
Ayant eu, dès le XVe siècle, le privilège d’éduquer les hommes à la danse avant que ceux-ci ne la toisent sur les tréteaux, la marionnette tient une place considérable dans l’esthétique des arts de la scène birmane. Par l’inestimable richesse de ses parures, soies et bijoux et le raffinement de sa facture, elle a laissé une forte empreinte sur le théâtre, la danse et le rituel birman.
Autrefois actionnés par plus de soixante fils, ces êtres miniatures parviennent à des exploits surhumains et parfois aussi nous fascinent par leurs tours comiques. Démons, ogres, princes, animaux mythiques et magiciens se succèdent en un sortilège de tableaux en musique dont on ressort émerveillé…
La danse
La danse classique birmane anyeint est apparue à la période Innwa (1.300 après J.-C.) et a su conserver une incroyable actualité grâce aux spectacles populaires Zat-pwe, enchaînant pièces de théâtre, intermèdes bouffons, joutes verbales, danses et chansons. Elle se compose de 125 pas fondamentaux, base de l’apprentissage, rassemblés dans la chorégraphie gabyalut.
Les danses masculines à la souplesse acrobatique, mettent en valeur l’éclat de parures princières quelque peu féminines, transformant les danseurs en des poupées dorées et lunaires, aux lèvres glacées, aux joues fardées, abondamment parés de perles et de soieries !
Très tôt aguerris à la désarticulation spectaculaire des membres, coudes et genoux, chevilles et poignets, torsions et sauts parfois vertigineux, les danseurs birmans semblent avoir emprunté aux danses indiennes leur puissance rythmique et narrative et aux danses thaïes la suavité du geste, la subtilité de la posture et le glaçage « glamour ».
Les danses racontent l’amour légendaire du couple princier Mintha et Minthami (prince et princesse), les mythologies fondatrices (Zawgyi le magicien…) ou encore des tableaux tirés du Ramayana birman.
La pagode Shwedagon : mythes et réalités
Objet de toutes les admirations, symbole de Rangoun et de la Birmanie, très haut lieu du bouddhisme, ville dans la ville, la pagode Shwedagon est auréolée d’un halo de mythes qui se poursuivent jusqu’à nos jours.
Origine de la Shwedagon
Elle contiendrait des reliques de quatre anciens bouddhas, dont huit cheveux du bouddha Gautama. C’est Gautama lui-même qui aurait donné ses cheveux à deux marchands de Rangoun venus de l’Inde à qui il demanda de construire un stûpa sur la colline de Singuttara qui renfermait déjà les reliques de trois anciens bouddhas. Lorsque qu’ils ouvrirent le coffret qui contenait les cheveux du bouddha, ceux-ci se mirent à briller, les arbres fleurirent et des pierres précieuses tombèrent en pluie du ciel avant d’être enchâssées dans la pagode nouvellement construite.
Cette légende indique que la pagode daterait du temps de Siddhârta Gautama, au XIe siècle av. J.-C., ce que les archéologues démentent. Pour eux, elle aurait été construite sous la dynastie Môn, entre le VIe et le Xe siècle.
Les faits
La tradition veut que les rois fassent donation de leur poids en or pour recouvrir le stûpa. Les rois birmans y réalisèrent des travaux successifs pour l’agrandir. Lors du tremblement de terre de 1768, le sommet du stûpa s’effondra. En 1931, un incendie majeur endommagea la pagode et en 1970, un nouveau tremblement de terre sévit et dévia la couronne hti.
Aujourd’hui, le stûpa de 98 mètres de haut, recouvert de milliers de plaques d’or, repose sur une plate-forme de marbre de près de 6 hectares et trône au milieu d’un ensemble de 64 petites pagodes et de centaines de statues de bouddhas et de nats !
En haut du stûpa, la couronne hti (ombrelle) comporte 1065 clochettes d’or, 420 clochettes d’argent et une boule d’or incrustée de 5.448 diamants, de 2.317 pierres précieuses et d’une émeraude de 76 carats !
Un secret
En se positionnant correctement sur une ligne invisible qu’il faut trouver, on peut voir tout le spectre irisé de l’énorme émeraude qui réfléchit la lumière. Cette impression visuelle est saisissante car l’on pourrait croire à une vision miraculeuse !